Comme une part non négligeable des expat(s) français(es) de Singapour, j’ai un handicap majeur dans ma vie: je suis une « DP » (Dependant Pass).

Ce qui indique essentiellement que:

Non, je ne gagne pas d’argent. Non, je n’ai pas de travail rémunéré.
Toute considération d’une vie professionnelle antérieure étant inutile.

Oui, pour subsister à Singapour je suis bel et bien dépendante des revenus de mon EP.
Accessoirement mon conjoint et mari. Que j’ai suivi jusqu’en Asie.

La chose étant posée…

J’ai donc la chance de profiter de sa générosité.
Entendez l’accès au compte-courant qu’il a ouvert à Son nom dans une banque locale.
Avec l’usage de Sa jolie carte de débit qui me permet d’assurer toutes les dépenses de la maison.
Et les miennes aussi.

Le bonheur.

À ce détail près que…

Jusqu’à présent, comme une part non négligeable des expats fraîchement débarqué(e)s, je n’avais pas accès à Pay Now* et aux autres services du même acabit sur mon smartphone, mon organe vital.

La Misère!

Quand tu vis à Singapour.
Qu’on t’en avait jamais parlé avant.
Que tu te retrouves 80% du temps bouche ouverte à la caisse d’une petite boutique, sans cash au comptoir du hawker center, coincée chez le Uncle qui t’a réparé ton vélo, bloquée pour rembourser le théâtre à ta copine ou conclure un deal en or sur les réseaux…

Et que, pour te sortir de l’impasse, tu dois faire appel au +65 de Julot (équipé, lui). Ce qui :
1/ impose à Julot (qui n’a pas de temps à perdre, lui !) de réaliser l’opération lui-même, parfois plusieurs fois par jour.
6,75 dollars pour le taxi partagé, 29 dollars pour le cadeau de la classe, 150 dollars pour le cours de piano …
2 / lui dévoile l’intégralité de ta vie quotidienne passionnante. T’as encore déjeuné au restaurant avec les copines ?
3 / Communique Son numéro à la terre entière pour régler Tes dettes, voire Te faire rembourser d’une avance.

La dépendance absolue quoi. Avec un léger sentiment de retour à l’ancienne.
Toute considération féministe étant purement fortuite.

Alors hier on a craqué. On s’est offert le rendez-vous du siècle.

Le passage au compte-joint !
Et un rendez-vous mémorable à notre banque préférée.
Car pour obtenir le précieux sésame, Monsieur devait m’accompagner.
Afin de préciser que :
Oui j’étais bien sa femme.
Pourtant on avait bien payé la traduction officielle en anglais du certificat de mariage..
Déclarer par écrit sur l’honneur que nous logions bien sous le même toit.
Pas de bol je n’apparais pas sur le bail de la maison.
Certifier que j’étais sans revenus (on avait bien compris) et que mon occupation était home maker. Gloups! 
Certifier que Oui il acceptait for ever de me laisser taper dans le trésor du mois (officiellement évalué)…
pour effectuer nos dépenses conjugales (officiellement estimées). Les autres aussi, bien sûr.

Et dire qu’en France depuis 1965 les femmes n’ont plus besoin de… Mais ne nous égarons pas.
Restons matérialistes. Sur ce coup-là, seul le résultat compte.

Après 1h30 de procédure, d’examens très méticuleux, de signatures en tout genre, de choix cornéliens…
Madame vous avez plusieurs noms? Oui, jeune fille et épouse. Mais ça rentre pas dans les cases. Lequel on coupe?
Le deuxième? Ah sur le passeport c’est pas pareil. Bon je vais demander à mon supérieur.

Ça y est.

Libérée, délivrée

Me voici co-titulaire de notre compte commun. Autorisée à faire des paiements en mon nom et sur mon numéro perso.
Allez hop, Paynow me voilà !!! À moi les p’tits cafés, courses de Noël faciles, en direct, où que ce soit.
L’indépendance made in Singapour quoi 🙂

Amis lecteurs, si vous êtes passés par là, je vous conseille de faire la même. Certes le rendez-vous bancaire est un peu long.
Mais ça simplifie la vie et le quotidien des DP. À bon entendeur…

* PayNow est un système de paiement/transfert/achat en ligne en temps réel, développé par l’Association des banques de Singapour. C’est l’un des plus largement utilisé par les entreprises, les particuliers et même les institutions. Il existe d’autres services équivalents sur l’île.

Rosita Rosita