Vous êtes nombreux à préférer utiliser les applis de taxi et fréquenter les chauffeurs un peu pros, pas du tout, à la folie… des coups de pédales. D’autres se retrouvent au volant parce que leur employeur leur offre cet avantage ou parce que la gestion de la vie de famille en est facilitée. Ils vivent alors cette expérience hors normes : conduire à Singapour.
Acheter sa voiture et le droit de la conduire
La voiture est un luxe ici ; l’état a instauré une taxe pour réguler le marché. Après avoir acheté votre carrosse, il faudra encore payer pour avoir le droit de l’utiliser. Ce droit, le COE ( certificate of entitlement) est valable 10 ans et s’acquiert au travers d’un système d’enchères qui a lieu 2 fois par mois. Soulignons l’extrême volatilité de ce COE qui peut, selon les périodes, être plus élevé que le coût de la voiture. Blurps…

C’est parti pour la conduite à gauche
Conduire est une façon unique de rencontrer les us et coutumes d’un pays. La première angoisse réside dans l’inversion des gestes : sera-t-on capable de se montrer aussi habile à droite qu’à gauche ? Va-t-on développer des compétences inespérées ? Va-t-on s’enivrer de ronds-points à contre sens ?
La réponse est plate ; il s’agit de faire confiance à la répétition, et les automatismes se prennent bien plus facilement qu’il n’y parait. Les essuie-glaces peuvent constituer une épreuve pour vos nerfs : tout dépend si la voiture est japonaise ou allemande. Et vous vous agacerez longtemps d’actionner spontanément le lave-glace en guise de clignotant.
Les chauffeurs que vous croiserez sur les routes
Le type princier
Il a toutes les caractéristiques de celui qui conduit sa future épouse à l’autel : très précautionneux, il ne la bouscule pas, elle pourrait changer d’avis. Il ne dépasse pas le 30km/h et affiche une incapacité totale à modifier le cap. Il ne se remet aucunement en cause au son des klaxons. Il se considère comme acclamé, voire envié. Le feu rouge est une occasion magnifique pour se pavaner : il s’arrête volontiers à 300 m du dit signal et savoure, tout son être est tourné vers la gloire de l’instant. Il ne facilite pas le passage des autres véhicules : ce sont ses invités, réjouis par les noces, contraints de le suivre au rythme de la marche nuptiale. Rien à faire, sinon que d’être patient et d’admirer son ondulation méditative dans le trafic.

Le type gardien du troupeau
Sa camionnette brinquebalante gémit dans les virages, secoue ses passagers sans scrupules. Ces derniers sursautent en gardant les yeux fermés, finissant leur nuit ou s’abandonnant à des rêveries qui les éloignent encore un peu des dures réalités des chantiers vers lesquels ils sont menés.
Le chauffeur achemine, sans état d’âme, le troupeau. Il sait qu’il y a un point A et un point B, le reste ne le concerne aucunement. Il peut traverser les 4 voies comme les champs, à son rythme à lui, sans penser qu’une accélération, à la mesure du flux, serait la bienvenue.
Le type pêcheur qui mène sa barque
Il flâne, il n’est ni vif, ni rapide. il est heureux d’observer le ciel, la terre…et les eaux poissonneuses : Il navigue d’une rive à l’autre, à droite puis à gauche, pas besoin de clignotant pour ce plaisancier. Pas besoin de tourner la tête non plus, son ongle coincé dans la narine gauche pourrait le blesser. Il est content d’admirer l’horizon, même s’il n’y en a pas, et peut bloquer 120 voitures derrière lui. Peu lui importe, il a prévu la journée entière pour sa sortie pêche.
Le type éleveur de faucon
Il, ou plutôt elle, conduit sa voiture comme s’il préparait son faucon pour la chasse. Une prédation mérite d’afficher un calme froid et déterminé. Quoiqu’il puisse se passer, il passera. Il a l’élégance de celui qui peut vous dévorer en un temps record. Ses doigts armés de diamants massifs lacèrent le volant et confirment la conduite carnassière, forcément au détriment d’autrui. Votre instinct de survie vous susurre de le laisser passer, rien de bon ne peut vous arriver : son carnet de constat a dû être imprimé à coups de griffes et vous ne sortirez pas indemne d’une telle rencontre.

Le type « Je te conduirai jusqu’aux portes du pénitentier»
Celui- là vous filme. Pas pour votre beau profil mais pour remettre la bande vidéo au poste de police le plus proche. Il a le souci de la sanction plus que celui de la justice. Il veut savoir que vous finirez sur l’échafaud, en lambeaux. Améliorer la circulation n’est pas une fin pour lui. Ce qu’il cherche ? Des exemples et des leçons exemplaires. C’est une vocation à part entière.
Ainsi s’appréhendent les joies de la route par ici. Entre celui qui conduit et qui ne connait pas le chemin et celui qui sait la route mais qui ne parvient guère à cheminer, il faut rester ZEN. Alors racontons-nous plein de blagues au volant pour nous détendre… et montrer notre plus beau sourire à toutes les caméras croisées sur la route au cas où il finirait en une du strait times!
AB