Loin de nous l’idée de faire référence à l’échec cuisant de l’armée britannique lors de la chute de Singapour en 1942. Nous ne reviendrons pas non plus sur la cruauté japonaise qui a marbré la mémoire collective locale de gestes humiliants.

Il était une fois un généreux patron de bordel, japonais, qui se fit le donateur de 7 hectares de plantation de caoutchouc. Soucieux d’offrir une dernière et sereine demeure à des jeunes femmes qui avaient passé leur courte mais intense vie à donner de leur corps dans ses établissements.
Monsieur Fukaki fut aussi un véritable artisan de l’entraide entre japonais, créant les germes d’un fort sentiment d’appartenance à ce qui est devenu la communauté japonaise de Singapour. Ce leader a permis l’érection de la Japanese Association, localisée aujourd’hui sur Adam Road, dans un virage en sortant du PIE. Pour info, on y trouve une épicerie dans le pur style nippon.

Pour rappel, au tout début des années 1870, le gouvernement japonais met en place un système de prostitution réglementé. Par le biais de l’Édit de libération des prostituées de 1872 et de nombreux textes de lois qui suivent, les autorités gèrent officiellement « ce marché ». Notamment dans le but d’améliorer la santé publique. Heureusement que les hommes s’en sont mêlés !
Il n’empêche que ce contexte a sans doute participé à l’émergence des femmes de réconfort au 20e siècle. Et aux karayuki-san ( littéralement « celles qui sont parties au-delà des mers »), jeunes filles qui se sont expatriées dans les pays asiatiques de l’Est et du Sud-Est pour y travailler en tant que prostituées.
Revenons à Singapour…En 1891, les Anglais sont débordés; ils perdent le monopole du tabac en Perse, ils sont en train de dépecer Bornéo en la partageant avec les Hollandais. Mais, forts de leur altruisme dans la gestion des sépultures, ils donnent leur accord pour créer ce cimetière qui abritera d’abord les dépouilles des karayuki-san mortes dans le plus grand dénuement mais auxquelles Monsieur Fufaki veut rendre un dernier hommage.

Ce qui est un des plus grands cimetières japonais du Sud-Est asiatique abritera ensuite des citoyens divers et variés : un agent secret qui se donna la mort, le premier docteur nippon, le fondateur du Mosquito coil incense/ comprendre les petites spirales vertes fumantes, des soldats qui perdirent la vie entre 1942 et 45, les 41 civils morts à la fin de la guerre dans le camp de Jurong où ils attendaient la date de leur convoi de retour.

Cette promenade offre un bel instant de recueillement dans un joli jardin où on croise quelques amoureux, et aussi quelques curieux qui tentent l’aventure dans le quartier de Yo Chu Kang. C’est une bonne occasion pour aller déjeuner ensuite à Chomp-chomp, le food court devenu une institution dans les environs. On ira se rafraichir dans le petit mall de My village où on trouve une boutique de vêtements et accessoires pour femmes, tenue par Barbara, véritable pilier de la communauté française.
Juste avant de rentrer, on achètera quelques fromages à la petite boutique pour se rappeler à quel point il est bon de se rapprocher de ceux qui consomment et parlent « comme nous »… Ode au rassemblement communautaire? non! Célébration des clusters…français, japonais et tous les autres.
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Cimetière Japonais – 825B Chuan Hoe Ave – Singapore 549854 / ouvert de 7h à 19h tous les jours
The Japanese Association – 120 Adam Drive – 289899
Chomp Chomp – 20 Kensington Park Rd – 557269
La Petite Boutique – 4 Kensington Park Rd – 557256
Paris Chic – 1 Maju Ave – #1-07 – 556679
Belle balade!
AB



